Ô toi, Noble Chevalier des Temps Modernes, pour emprunter dans de bonnes conditions, les dix commandements suivants tu respecteras.
1er commandement :
De l’argent frais tu apporteras, à raison de 20%. Entre 10 et 20%, les banques te le feront cher payer. En dessous, ton chemin, tu passeras.
L’apport correspond, pour le banquier, à la marge de sécurité. Avec 20% d’apport, en cas de défaillance de remboursement du prêt immobilier, le banquier limite son risque. Surtout les premiers mois, s’il doit revendre le bien immobilier, il peut espérer le revendre même dans de mauvaises conditions, au-dessus du montant emprunté. Il faudrait qu’il le revende plus de 20% moins cher pour qu’il commence à perdre de l’argent.
En dessous de 20% d’apport, son risque de perte augmente et il le répercutera donc dans le taux d’intérêt.
En dessous de 10%, sauf emprunteur présentant des garanties fortes par ailleurs, votre banquier préférera sans doute ne pas prendre le risque.
2nd commandement :
Un CDI ou tout autre revenu stable tu présenteras. Tout crédit doit naturellement être remboursé. Le banquier est ton ami et tient à le rester.
Il sait que les coups durs n’arrivent pas qu’aux autres. C’est dans ce sens encore qu’il veillera à ne pas vous engager pour de nombreuses années dans une voie incertaine. En particulier, il veillera à ce que vous ayez une source de revenus suffisamment solide. Dans ce sens, il évitera les CDD et les CDI en cours de période d’essai. Il évitera aussi les rémunérations trop variables ou avec un fixe trop faible. Il privilégiera des CDI bien établis chez des employeurs fiables, des pensions fixes ou des rentes stables (revenus fonciers par exemple).
3è commandement :
Chez un employeur fragile tu t’abstiendras de travailler. Encore plus, si ton conjoint co-emprunteur y travaille déjà.
Les banquiers n’en parlent pas beaucoup mais, toujours dans le souci de ne pas vous engager dans une galère potentielle, leurs systèmes d’analyse de risque intègrent la fragilité de votre employeur. Surtout s’il est répertorié parmi les entreprises en difficulté ou ayant connu des défaillances de paiement. Si votre conjoint y travaille aussi , cela peut aller jusqu’au refus de tout nouveau crédit y compris de simples facilités de paiement en trois ou quatre fois.
4è commandement :
Ton taux d’endettement tu surveilleras. Sous les 35%, tu le maintiendras.
Ce taux se calcule par la division du montant des remboursements, assurance comprise, de tous les prêts en cours, par le revenu net disponible du foyer. Pensez, le cas échéant, à intégrer votre conjoint non marié en co-emprunteur, s’il travaille et s’il n’est pas trop endetté ou bien à jouer sur la durée du prêt. Rallonger la durée d’un prêt diminue le montant de la mensualité et donc le taux d’endettement.
Attention aux prêts à taux variable. Ils sont attractifs parce que généralement plus faibles (parce que moins risqués pour le prêteur). Quand une baisse durable des taux est annoncée, ils permettent de l’accompagner, année après année, sans devoir renégocier son prêt. Inversement, depuis un an, les taux ont sensiblement remonté. Avec un taux variable, l’emprunteur est en risque en cas de hausse. Si ses mensualités et donc son taux d’endettement sont initialement plus faibles qu’avec un taux fixe , ils peuvent augmenter très rapidement en cas de hausse des taux (potentiellement bien plus rapidement que les revenus en cas d’inflation). Ils ont été, avec les subprime, l’une des principales causes de la crise de 2008 et c’est pour cela qu’ils ne sont quasiment plus proposés. Mais notre mémoire est courte. Prudence donc.
5è commandement :
Train de vie prudent tu maintiendras. En particulier tes remboursements ne devront pas trop excéder tes anciens loyers. La taxe foncière et les dépenses de chauffage tu prévoiras.
Ce critère peut paraître redondant avec le précédent. Mais, peu importe le taux d’endettement, il est toujours difficile de s’adapter quand un loyer mensuel de 500 € est remplacé par une mensualité de 1000 € ou plus. Or c’est souvent le cas. Quand on achète, on prévoit pour longtemps. On prévoit l’arrivée des enfants, etc. On opte logiquement pour un logement plus grand. Les remboursements seront plus importants que les loyers précédents. Une taxe foncière ainsi que des dépenses de chauffage plus importantes viendront s’y rajouter. Cette progression de dépenses fixes doit rester raisonnable.
6è commandement :
Bon gestionnaire tu te présenteras. Tu le prouveras par un solde de compte bancaire stable et positif sur les derniers mois. Tes engagements, paiements ou remboursements, toujours, autant que le Roi, tu auras respectés.
En clair : aucune défaillance de paiement, aucun découvert non autorisé ou révélateur de dépenses inconsidérées ne doit apparaître dans votre historique. Cela mettrait en doute votre fiabilité.
7è commandement :
Toutes les dépenses liées à ton achat immobilier, tu intégreras :
• Prix d’achat et, le cas échéant, coût de construction
• Coût des travaux éventuels de rénovation et de mise aux normes
• Commission d’agence
• Frais de notaire et droits de mutation
• Frais de dossier de crédit et d’assurance
8è commandement :
Ton banquier tu raviras. Tu souscriras l’assurance qu’il te propose. Tu pourras toujours en changer après un an ou plus si ce cher Sir est trop dispendieux.
L’assurance est une bonne source de marge. La concurrence entre les banques passe par la comparaison facile des taux d’intérêts nominaux affichés dans les publicités. Elle passe beaucoup moins par les taux effectifs globaux qui intègrent les coûts d’assurance parce que ces derniers dépendent de la situation de chaque emprunteur. C’est pour cela que les banques reportent le plus souvent leur marge sur les frais de dossier et d’assurance. Laisser une marge suffisante à son banquier est un meilleur moyen de le convaincre de nous prêter de l’argent plutôt que de lui faire une démonstration de nos talents de négociateur impitoyable.
Aussi, pour maintenir une certaine concurrence en évitant les situations définitivement figées, la Loi française donne la possibilité de changer tous les ans d’assurance. Vous pouvez donc accepter l’assurance proposée par votre banquier sans crainte. Vous pourrez toujours en profiter, à l’issue de la première année de remboursement, pour changer d’assurance, en cas de gourmandise excessive de votre banquier.
9è commandement :
La concurrence tu feras jouer en toutes circonstances. Ton agent immobilier ou un courtier, tu interrogeras.
Comme évoqué, au-delà du taux d’intérêt nominal affiché (par exemple 3,5% l’an) il faut intégrer les frais de dossier qui se rajoutent au montant emprunté. De même, les frais d’assurance se rajoutent aux mensualités. Or ces frais varient en fonction de votre situation personnelle (prise d’hypothèque ou non, âge et état de santé, métier à risque, pratique d’activité sportives dangereuses, etc) et ne sont donc pas connus d’avance. Pour une situation personnelle donnée, les banques ont des grilles d’analyse et des tarifs assez variables. La motivation des banques pour vous séduire ou vous éconduire ne fera qu’amplifier ces écarts.
Même si en période de hausse des taux, cela a moins d’importance, il faut aussi penser à vérifier que les pénalités de remboursement anticipé restent raisonnables.
Il faut donc impérativement interroger plusieurs banques. Si vous le faites vous-même, vous le ferez sans doute un peu à l’aveugle. A l’inverse, grâce à leur connaissance du tissu bancaire, les courtiers en crédit vous orienteront plus facilement et plus sûrement vers les banques les plus compétitives dans votre cas précis. Ils vous aideront aussi à bien intégrer ces dix commandements dans votre demande de crédit et à les adapter aux préférences de chaque banque.
10è commandement :
Patient et souple comme le roseau tu seras. En cas de refus, ton temps tu prendras.
Par exemple, en attendant la prochaine fixation mensuelle des taux d’usure. En allongeant la durée de ton emprunt pour réduire les montants des remboursements. Ou encore en consultant d’autres banques. Ou enfin en laissant du temps aux mesures prises par le Roi pour redresser la conjoncture du pays en cas de disette.
Sauf si votre situation n’est durablement pas compatible avec la souscription d’un emprunt (principalement l’absence de revenu stable et a priori durable) ou si votre courtoisie vis-à-vis de votre banquier s’est éclipsée quand il vous a annoncé la mauvaise nouvelle, les choses peuvent changer et un refus n’a rien de définitif.
Et s’il y avait un 11è commandement :
Ô toi, Grand Seigneur, tu sais que la réussite sourit à ceux qui savent s’appuyer sur les sorcières et les bonnes fées !
Bref : pour tout point complémentaire en fonction de votre situation personnelle n’hésitez pas à me contacter.
Ancienne banquière, je saurai utilement vous conseiller ou vous orienter.
Bonne fée ou sorcière, vous me direz !